Chapitre 7

UN PERFECTIONNEMENT DE L'APPROCHE "VOLUME"

 

1. Problème posé

La technique "volume", exposée lors du chapitre "Quel type de spatialisation pour le cube ?", nous permettait, sous certaines conditions et avec les réserves déjà exprimées, de simuler l'existence d'une source virtuelle à l'extérieur du cube.

On pouvait, en particulier, faire tourner cette source à la surface d'une sphère dont le centre coïncidait avec le cube.

On aimerait maintenant pouvoir créer une source qui ne soit plus ponctuelle, c'est-à-dire donner l'impression à l'auditeur que la source remplit la distance entre un point sur l'extérieur de la sphère et le cube.

De cette manière, en faisant tourner la source, celle-ci ne décrit plus la surface d'une sphère, mais une sphère pleine.


2. Premières expérimentations

 

On décide donc, afin d'arriver à ce résultat, de réaliser un patch Max MSP permettant deux spatialisations distinctes d'un même son.

Le son serait alors "envoyé" simultanément à deux endroit distincts de l'espace, ce qui nous permettrait de créer cette impression d'épaisseur.

Malheureusement, cette méthode ne donne rien, ce qui est tout à fait logique, puisqu'on ne fait qu'additionner des vecteurs. On arrive donc au même résultat qu'avec une seule trackball, dont les coordonnées sont la somme algébrique des coordonnées des deux trackballs indépendantes mises en jeu.

De ce fait, avec deux projections bidirectionnelles, on a même parfois une annulation pure et simple du signal.

Il faut donc perfectionner la méthode, et pour ça, on a recours à la traditionnelle stéréophonie de phase.

 


3. Rappel sur la stéréophonie de phase

 

Au chapitre "localisation", on peut trouver un court exposé concernant ce qu'on appelle "localisation par différence de phase".

On peut y lire qu'une des méthodes utilisées par le cerveau humain pour localiser une source dans l'espace est de mesurer la différence de temps ou de phase(D t ou D j ) entre les rayons acoustiques arrivant à l'oreille.

 

Dans la situation d'une prise de son stéréophonique, on souhaite, à l'écoute, recréer la position du source entre les deux enceintes. Pour ce faire, on peut utiliser une technique de prise de son en différence de phase.

Le son issu de la source arrive au micro droit avant d'arriver au micro gauche, et se trouve donc émis par le HP de droite avant le HP de gauche. Ainsi, l'auditeur entend le son à droite.

*Remarque 1

Une caractéristique importante de cette technique de prise de son est de pouvoir, sous certaines conditions, être à l'origine d'une intéressante impression d'espace, d'"air", autour de la source. Dans certains cas, l'auditeur a réellement l'impression d'un espace "continu" entre les deux enceintes - à ce sujet, il sera utile de lire, dans le chapitre "localisation", le paragraphe "une remarque à propos de la phase".

*Remarque 2

Pour des raisons difficilement modélisables, des différences apparaissent dans le détail du son entre ce qui est pris de la source par le micro et le micro 2.

Autrement dit, si on compense par un delay le D t entre les 2 HP, et qu'on soustrait les deux signaux, il n'y aura pas annulation du son provenant de la source.

 


4. Application au problème à résoudre

 

La remarque 2 nous met sur la voie : puisqu'on cherche à éviter des annulations de signal, voilà qui pourrait peut-être servir.

La remarque 1 confirme cette intuition, puisqu'on recherche une impression d'épaisseur entre deux sources.

On décide donc, au lieu de spatialiser deux fois un même son, de spatialiser simultanément les deux canaux d'une prise de son issue d'un couple non coïncident, d'une prise de son utilisant donc la technique de stéréophonie de phase.

 

Après quelques tâtonnements, il s'avère qu'en utlisant la configuration suivante :

*une voix en bidirectionnel, fixe, latéral
*l'autre en bidirectionnel, rotation dans les trois dimensions,

on constate que non seulement on n'a jamais d'annulation, ni même d'atténuation d'un des signaux par l'autre, mais qu'en plus l'impression d'"épaisseur" recherchée, de "boule pleine", est bien là.

 


5. Inconvénients de la méthode / autres essais possibles

 

On est donc arrivé à nos fins ; ceci dit, trois points négatifs :

1. diminution de la décentralisation - la sphère dans laquelle s'inscrit le mouvement est plus petite que celle sur laquelle s'inscrirait le mouvement de la voix mobile

2. diminution de la mobilité - alors qu'avec une seule source mobile, on n'aurait aucun problème à entendre les mouvements, ici, ils sont plus délicat à entendre, et on a parfois l'impression de ne plus entendre qu'une sorte de masse mouvante assez floue

3. problèmes de distance de l'auditeur - en s'éloignant du cube, on perd bien plus rapidement toute impression de spatialisation que dans le cas d'un seul son

 

On pourrait néanmoins tenter d'améliorer cette technique, notamment en essayant les projections suivantes.

une voix en omni (corrigée coupe-bas ~6dB/oct) + l'autre en cardio
ou
une voix en omni (corrigée coupe-bas ~12dB/oct) + l'autre en bi
ou
une voix en cardio (corrigée coupe bas ~6dB/oct) + l'autre en bi
etc…

Peut-être l'ajout d'une troisième voix de spatialisation mettant en jeu une reverb serait-elle également utile, même si, très probablement, elle poserait de nouveau un problème d'annulation d'un signal par un autre.