Le but de cette action spécifique est de constituer un horizon conceptuel et méthodologique commun entre les différentes disciplines qui seront associées dans le réseau ArtiSTIC.
En effet, la réunion fondatrice du 31 mai 2002 avait permis de souligner le caractère tout particulièrement transdisciplinaire de ce RTP, puisqu’il doit pouvoir associer étroitement STIC, SDV et SHS, mais aussi milieux et acteurs artistiques et culturels, eux-mêmes extrêmement divers (que l’on songe aux écarts, sinon aux pures oppositions, qui séparent la plupart du temps artistes et industries culturelles).
La même réunion avait également souligné qu’avant même de pouvoir traiter de la question artistique, c’est-à-dire de ce qui peut être jugé comme artistique, il fallait instruire la question très générale de l’esthétique humaine, c’est-à-dire précisément de l’esthétique en tant qu’elle constitue un jugement de goût (au sens large ici du mot « goût »), et en particulier, telle qu’y intervient, directement ou indirectement, une médiation technique - que ce soit aux moments de la « production » ou de la « réception » des oeuvres, mais aussi au cours de la constitution, notamment par des procédures diverses d’apprentissages, dont l’enseignement et les institutions culturelles, d’une « faculté de juger ».
Afin de faciliter un dialogue transdisciplinaire aux plans à la fois conceptuel et méthodologique, mais aussi afin d’établir une carte des différends et des alternatives théoriques et par contrecoups technologiques qu’il serait intéressant de confronter, nous avions évoqué le projet d’une « organologie générale » qui expliciterait les interfaces et les interférences - y compris comme apories - entre organes des sens, organes techniques et organisations sociales au sein desquels se forment, se transmettent et se transforment les jugements esthétiques.
Nous proposons d’organiser dans cette perspective un séminaire qui pourra éventuellement accompagner conceptuellement et méthodologiquement d’autres actions spécifiques. En effet, l’AS proposée ici s’inscrit dans le premier thème qui a été retenu pour le RTP, à savoir Esthétique humaine - Arts, esthétique, cognition, et devra être explicitement mise en relation avec les quatre autres thèmes (Analyse, Lutherie, Perception et Accès).
Ce séminaire permettrait autour d’exemples issus de domaines variés de l’expérience esthétique d’explorer la question des conditions conjointement physiologiques, technologiques, sociales et environnementales de l’évolution esthétique dans les domaines les plus divers de la sensibilité humaine. Et ce,
• d’une part en neutralisant provisoirement la singularité des questions propres au jugement esthétique dans le domaine des arts, peut-être pour pouvoir ensuite les réaffirmer avec plus de force,
• d’autre part dans l’optique de produire ultimement un cadre théorique et méthodologique pour la conception des interfaces entre organes techniques (d’analyse d’œuvre et/ou de produits esthétiques, de production d’œuvres et/ou de produits esthétiques, d’élargissement de la perception, d’accès à des oeuvres), organes de perception et organisation de socialisation du goût.
L’exploration de cette histoire de l’esthétique humaine pourra et même devrait en passer par une thématisation des questions propres à l’esthétique animale.

Dans le cadre de l'Action Spécifique "Esthétique et Organologie Générale", un séminaire est organisé autour des problématiques suivantes.

Les séances se tiendront à l’Ircam à partir de février 2003, à raison d’une séance de 4 heures par mois. Les dates seront disponibles en ligne prochainement.

• Tenter de problématiser les conditions génétiques d’une esthétique humaine. Etablir en quoi elle fait système avec les dispositifs organiques, les supports organologiques et les supports organisationnels producteurs et transmetteurs de symboles et de critères.

• Transférer ces problématiques vers les producteurs de systèmes organologiques nouveaux que sont les labos des STIC.

• Périodiser même très succinctement une histoire de l’esthétique et une histoire de l’organologie (en distinguant dans celle-ci les mnémotechniques en propre).

• Caractériser les spécificités organologiques de l’esthétique contemporaine, y compris en prenant en compte l’esthétique industrielle. Exemple : la fabrication du goût par le marketing en tant que, s’adressant à un consommateur, elle tend à éliminer le temps de l’apprentissage (et du même coup le temps des pratiques instrumentales. Exemple : le problème de l’instabilité des instruments).

Questionnement de l’esthétique en amont de la question de l’art. Ethologie.

2. Discernement, physiologie du goût, sensation et symbole

Comment fonctionnent les organes du goût ? Quelles sont les modalités de son apprentissage?

3. Fabrication du goût et du jugement

Théorie du marketing, sémiologie de la publicité, histoire de l’alimentation, etc.

4. Constitutivité de la prothèse

Questions d’organologie, Action/Perception vue par le biais de l’analyse de la prothèse.

5. Historicité des sciences symboliques

Sciences de la culture, perspective, etc.

6. Enseignement artistique

« Voir avec les doigts », « entendre avec les yeux ». Apprentissage du geste.

7. Esthétique de la réception et de la reproductibilité

Problématique de l’analyse, place de la reproductibilité dans les arts contemporains.